Il y a quelques jours, lors d’une visite d’entreprise chez Waspito, l’équipe avait prévu de remettre un panier cadeau au fondateur. Geste élégant, attention bien pensée… mais un détail m’a immédiatement frappé : le panier contenait très peu de produits locaux.
J’ai alors demandé, calmement mais fermement, que le panier soit refait. Pas par purisme. Pas pour “faire genre”. Mais parce que je crois profondément que notre consommation quotidienne est un acte politique, économique, et identitaire.
La cohérence commence chez nous
Nous ne pouvons pas, en tant qu’acteurs du secteur agroalimentaire africain, promouvoir des slogans tels que « Consommons local » ou « Nourrir l’Afrique par ses propres ressources », tout en offrant des biscuits importés, des confitures européennes ou des jus fabriqués à l’autre bout du monde.
Ce que nous disons aux autres ne vaut rien si ce que nous consommons nous-mêmes ne suit pas. C’est un travail que j’ai commencé dans ma propre vie il y a quelques années, au point où les membres de mon entourage proche estiment que j’en fais trop. Mais je suis convaincu que rien d’autre que cet acharnement ne peut nous conduire au résultat escompté.
Chaque fois que nous mangeons, offrons ou recommandons un produit, nous faisons un choix. Et ce choix parle bien plus fort que tous nos mots, tous nos posts LinkedIn ou toutes nos interventions en conférence. Aujourd’hui, il m’arrive d’ouvrir mon réfrigérateur et mon garde-manger pour vérifier l’inventaire de ce qui s’y trouve, et m’assure que le local remporte toujours la bataille. Car oui, pendant que nous agissons en silence, pendant que nous espérons timidement un modeste succès de nos entreprises de production, les concurrents arrivent avec les moyens de leur politique, des capitaux énormes, un marketing agressif et de quoi faire pâlir n’importe quel patriote. Nous devons faire face à cette réalité de manière hargneuse, sans en avoir honte.
En relisant les épisodes précédents de l’histoire du monde, il est facile de constater que tout ce que nous considérons aujourd’hui comme des habitudes, n’a pas été adopté par pure volonté. Afin qu’elles s’infiltrent dans la vie de tous les jours, des moyens inimaginables comme la privation ont souvent été implémentés. Nous sommes certes dans un village planétaire, mais il nous revient de ne pas faire preuve de naïveté. Sinon, nos entreprises ne sont pas prêt de décoller dans un écosystème de plus en plus compétitif où en plus, nous devons avancer avec très peu d’aide concrète.
Nos producteurs ont besoin d’ambassadeurs, pas seulement de clients
Consommer local, ce n’est pas « faire plaisir » à l’agriculteur du coin.
C’est rendre viable son activité, valoriser ses efforts, encourager sa montée en qualité.
C’est le reconnaître comme un pilier économique et social. Et à la fin de la journée, c’est lui apporter de la valeur ajoutée pour continuer d’exister.
Et qui de mieux placés que nous – entrepreneurs, collaborateurs, communicants, distributeurs – pour montrer l’exemple?
Si nous ne consommons pas nos propres produits, qui le fera à notre place ?
Ce n’est pas du marketing. C’est une loyauté au service même d’une de nos valeurs les plus importantes : souveraineté audacieuse.
Le panier que nous avons finalement offert à Waspito contenait :
- Des chips de plantain artisanales.
- Un sirop à l’ananas local, embouteillé proprement.
- Des biscuits de la marque Bobo faits à base de beurre et cacao Camerounais.
- Des cookies à la noix de coco.
- Des arachides caramélisées.
- Et pour agrémenter le tout, quelques savoureux fruits de saison.
Et devinez quoi ?
L’impact a été immédiat.
Non seulement le geste a été perçu comme plus sincère, mais cela a aussi ouvert une discussion sur les filières, les marques locales, les collaborations possibles. En attirant l’attention du promoteur sur l’importance de promouvoir et accompagner cette consommation de produits plus en adéquation avec le secteur de la santé dans lequel il opère lui-même.
Ce que nous avions entre les mains, ce n’était pas un simple cadeau. C’était une vitrine. Un message. Une preuve de foi.
Dans l’alimentation comme ailleurs, soyons les premiers clients de ce que nous défendons.
Chez Agrifrika, nous croyons que les produits agricoles locaux doivent être respectés, valorisés et consommés… d’abord par ceux qui en parlent.
La meilleure façon d’encourager les autres à croire en l’Afrique, c’est de commencer par agir en cohérence avec nos valeurs.
Alors la prochaine fois que vous offrirez un panier, organiserez un cocktail ou ferez vos courses pour la maison ou le bureau… posez-vous une seule question : Est-ce que j’aurais pu choisir un produit local de qualité à la place ?
Parce que oui, consommer nos produits, ce n’est pas un slogan.
C’est un engagement. Et nous devons en être les premiers ambassadeurs.
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