Le développement de l’agriculture africaine repose de plus en plus sur l’utilisation d’intrants chimiques, notamment les engrais. Si leur efficacité sur les rendements est indéniable, la dépendance croissante de l’Afrique aux engrais importés pose une série de problèmes structurels, économiques et environnementaux qui, à terme, menacent la souveraineté alimentaire du continent. Cette dépendance est une bombe silencieuse, trop peu évoquée dans les débats publics, mais dont les effets se font déjà sentir.
1. Une facture qui explose
Chaque année, l’Afrique dépense plusieurs milliards de dollars pour importer des engrais. Cette facture s’alourdit à chaque fluctuation du marché international, crise géopolitique ou dévaluation monétaire. En 2022, par exemple, la guerre en Ukraine a fait bondir le prix des engrais azotés de plus de70 %. Résultat : de nombreux producteurs n’ont plus les moyens d’en acheter, compromettant les campagnes agricoles.
2. Des producteurs pris en otage
Quand le prix des engrais monte, les petits exploitants sont les premiers à trinquer. Faute d’alternatives locales accessibles, ils se retrouvent contraints de réduire les doses ou d’abandonner certaines cultures. Cela crée un cercle vicieux : moins de production = moins de revenus = moins de moyens pour la prochaine campagne. La dépendance devient une trappe.
3. Des alternatives négligées
Le continent regorge pourtant de solutions locales :
- Compost organique, à partir de déchets agricoles ;
- Engrais bio à base de fumier, de biochar ou de résidus végétaux ;
- Microfertilisants issus des technologies agricoles durables ;
- Coopérations Sud-Sud pour la production d’engrais à base locale.
Mais ces solutions manquent d’investissement, de structuration, et surtout de volonté politique à grande échelle.
4. La souveraineté agricole passe par la fertilité locale
Une Afrique qui dépend de l’extérieur pour nourrir ses sols ne pourra jamais nourrir durablement ses populations. Il est donc urgent de relocaliser une partie de la production d’engrais, d’investir dans les alternatives durables, et de sensibiliser les producteurs à des pratiques agroécologiques.
La bombe silencieuse de la dépendance aux engrais importés n’explosera pas avec fracas : elle s’exprime déjà par la précarité croissante des producteurs, la volatilité des prix alimentaires et la perte de souveraineté sur nos systèmes agricoles. Chez Agrifrika, nous croyons à une agriculture connectée mais ancrée localement, qui valorise les ressources du territoire plutôt que de les troquer contre une dépendance structurelle. Le sol africain mérite mieux. Et il est temps d’agir.
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