Tout ce qu’il y a derrière une tomate
Quand on achète une tomate au marché, on pense rarement à tout ce qu’elle a traversé pour arriver jusque-là. On pense encore moins à la personne qui l’a cultivée, au prix de ses nuits blanches, de son dos courbé, de ses économies et de ses espoirs.
Pourtant, entre la graine mise en terre et le produit vendu sur un comptoir au marché Sandaga, il y a un chemin long, incertain, parfois cruel. C’est un vrai parcours de combattant.
Tout commence par des choix cruciaux
D’abord, il faut choisir :
La graine : est-elle de bonne qualité ? D’où provient-elle ? Va-t-elle germer ?
Donner des fruits ?
Le terrain : est-il adapté à la culture qu’on souhaite planter ? Est-il fertile,
accessible, exploitable ?
La saison : est-ce le bon moment pour l’arachide ? Pour le maïs ? Les pluies seront-elles au rendez-vous ? Seront-elles tardives ? Ou trop violentes ?
Il faut espérer que la météo ne soit pas capricieuse, que les intrants soient disponibles et efficaces, que les engrais ne coûtent pas une fortune cette année. Il faut préparer le sol, investir sans garantie de retour, semer et… croiser les doigts. Dans ce métier, rien n’est jamais sûr, sauf l’effort.
La croissance, ou le début des épreuves
Quand les premières pousses apparaissent, ce n’est pas encore gagné. C’est là que commence une avalanche d’épreuves : insectes dévastateurs, maladies des plantes, vents trop forts, pluies insuffisantes ou brutales, herbes envahissantes. La mauvaise herbe, elle, ne tombe jamais malade… L’agriculteur doit protéger ses cultures comme une armée défend son territoire.
Jour après jour, souvent seul, sans repos, sans couverture sociale ni sécurité sanitaire. Il encaisse les échecs, les pertes, les saisons mortes. Il serre les dents, il continue.
Récolter n’est pas encore réussir
Quand la récolte arrive enfin, ce n’est pas la fin du combat. Il faut cueillir au
bon moment : ni trop tôt, ni trop tard. Dans certaines localités, l’agriculteur doit même défendre ses récoltes contre les voleurs, au risque de sa vie.
Il faut ensuite stocker, comme on peut, faute de chambres froides, de silos, de solutions adaptées. Jusqu’à 30 à 40 % des récoltes sont perdues chaque année faute de moyens post-récolte.
Et puis, il faut acheminer les produits sur des routes dégradées, dans des véhicules inadaptés, à travers des zones incertaines.
Le marché : l’étape la plus injuste
Et quand il arrive enfin au marché, ce n’est pas encore gagné. Face à lui, des acheteurs qui fixent les prix, sans discussion. Lui, il ne connaît pas la logique du marché, il n’a pas l’information, ni les outils de négociation. Il vend à perte, ou il laisse pourrir. Il regarde son travail être bradé, sa sueur méprisée, son engagement ignoré. Il pense à ses enfants, aux dettes, aux charges. Son visage s’assombrit.
Le producteur mérite plus que notre silence, car c’est lui qui nous nourrit
Sans lui, rien ne pousse. Rien ne se vend, rien ne se mange. Il est temps de reconnaître que produire en Afrique, c’est encore trop souvent un acte de foi, un combat quotidien, un défi logistique, financier et humain.
Il est temps de mieux encadrer, mieux former, mieux organiser. De
transformer nos systèmes, pour honorer ceux qui nous nourrissent. Parce qu’entre la graine et le marché… c’est toute une société qui tient.
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